Philippe Vourch, présente un ancien pot d'ananas Royal

Royal récolte les fruits de la diversification

Le 06 octobre 2015

Plus de 100 ans après sa création, l’entreprise agroalimentaire située au Gros-Morne innove sans cesse dans la transformation des fruits entièrement cultivés en Martinique. Un pari réussi pour la goyave avec l’espoir de revenir à ses racines premières : l’ananas.

 

Sur l’habitation Dénel, qui donne son nom à la fois au quartier et à l’usine, le regard tombe sur un vaste domaine qui s’étale sur les bords de la route départementale au Gros-Morne. Un périmètre de 60 hectares qui abrite l’une des plus anciennes usines de transformation de fruits de la Martinique aujourd’hui âgée de 106 ans. L’histoire de cette grande dame est symbolisée par un couloir long de 5 mètres environ. Il sépare les installations historiques de la partie moderne. D’un côté, il y a les « vestiges », qui sont cependant encore actifs de la Compagnie Antillaise fondée en 1908 par le Baron de Sommery. Il lançait ainsi à l’époque la première usine d’ananas française dans les colonies. De l’autre côté, on trouve les installations réalisées en 2012. Ces deux bâtisses referment leur coeur de l’activité qui se traduit par une grande mutation autour de deux pôles : la diversification des fruits à transformer et la polyvalence des outils de fabrication. Cette orientation économique a été prise en 1990 à la suite de l’abandon de l’ananas. En lieu et place, la production a été orientée vers la goyave, devenue, depuis 20 ans, l’épine dorsale de la production de jus ou de confiture.

 

 

Ananas, goyave, puis prune de cythère, canne, banane…

L’usine compte une cinquantaine de salariés, avec à leur tête, Philippe Vourch, un enfant de la « maison » Despointes où il est entré il y a 11 ans. De l’ananas à la goyave, il n’y a pas eu un long moment de passage à vide car il fallait de la matière première. Pour ce faire, Royal s’est appuyée sur un groupe de planteurs au sein duquel se trouvent trois grands noms de l’agriculture en Martinique : Marcel Camou, Emile Rosalie et Alain Marie-Calixte.

 

Sous la houlette de ces « artisans de la terre », de vastes vergers de goyave ont vu le jour dans la zone proche de Royal : au Robert et au Gros-Morne. Le résultat ne s’est pas fait attendre, car en 2010, la production de goyave a atteint l’autosuffisance. Alors, à côté du jus, l’entreprise élargit sa gamme de produits à la confiture et le nectar de goyave. Forte de ces résultats, Royal a modernisé ses installations afin d’adapter l’expérience de la goyave à d’autres fruits dont la prune de cythère, le jus de canne, la confiture de banane… La mayonnaise est en train de prendre.

« À chaque fois, il faut oser franchir le rubicon », s’exclame Philippe Vourch qui a le maracuja, entre autres fruits, en ligne de mire. L’abricot pays va tomber aussi dans l’escarcelle de Royal et pour ce fruit ce n’est pas la peine d’aller chercher trop loin, car 450 arbres abandonnés depuis des lustres autour de l’entreprise fourniront la base de la production.

 

La diversification porte également sur la groseille, le piment végétarien qui occupent la moitié des surfaces exploitées autour de l’usine.

Il y a aussi quoi ? L’ananas… Le fruit des premiers temps qui revient. Abandonné dans les années 1980, l’ananas revient par la petite porte. Pour l’instant, il est planté sur trois hectares seulement avec deux variétés la MD2 d’Amérique du sud et le Queen de la Réunion. « C’est un challenge pour nous », lance Philippe Vourch. Rendez-vous est donné dans vingt ans pour voir si l’ananas connaîtra le même essor que la goyave.

Armé d’une foi inébranlable dans les promesses de la terre, Philippe Vourch voit l’avenir de Royal inséparable de son environnement en terme foncier et de savoir-faire ancestral. C’est le cocktail qui forme la recette de base de Royal.

 

 

Hommes et machines

Processus de fabrication

Aujourd’hui encore, le savoir-faire des hommes fait la richesse de Royal. Ils sont parfois debout, dans une position immuable devant leur poste de travail pour surveiller le passage des fruits au poste de lavage et de tri. D’autres sont aux commandes des ordinateurs pour analyser les étapes de transformation des fruits. La tradition rejoint presque la modernité dans leur geste lorsqu’il manie les fruits ou quand ils appuient sur les touches du cadran de contrôle. Mais aussi il y a les équipements qui permettent de traiter une quinzaine de variétés de fruits différentes. En effet, les machines partagent avec les hommes la polyvalence dans la transformation des fruits. Il n’y a pas de machine dédiée uniquement à la goyave, selon la production du jour, elles traitent d’autres fruits. C’est l’une des innovations introduites par Royal, à savoir toute la réflexion liée à la production limitée à la consommation locale et non la grosse production industrielle qui exige la multiplication des outils.

 

 

Repères

Quelques dates

  • 1908 : création sur l’habitation Dénel de Royal.
  • 1928 : L’entreprise est achetée par les familles Simonet, Despointes et Aubéry.
  • 1985 : la plantation de goyave est lancée.
  • 1990 : Arrêt de la de la production du jus d’ananas et orientation vers la goyave.
  • 1998 : Achat par Antilles-Glaces, du groupe Alain Despointes.
  • 2010 : Installation des outils polyvalents pour la transformation d’une quinzaine de fruits.

 

Quelques chiffres

  • 30 000 litres de jus sont produits par jour.
  • 1 700 tonnes de fruits (une quinzaine de variétés) sont transformées par an.
  • 3 000 kilos de confitures sont fabriqués par an.

 

 

Pourquoi Royal ?

L’ananas, abandonné dans les années 1980, le fruit des premiers temps, revient. Pour l’instant, il est planté sur trois hectares seulement avec deux variétés la MD2 d’Amérique du sud et le Queen de la Réunion.

La question du nom de la marque ne fait pas partie des jeux de connaissance générale sur l’histoire de la Martinique. La colle est posée par Philippe Vourch. Il laisse à l’interlocuteur quelques seconds de cogitation avant de donner l’information. « Le Baron de Sommery (fondateur de l’entreprise) l’a appelée ainsi pour la couronne au dessus de la tête de l’ananas ».

 

Écrit par Adams Kwateh – France Antilles

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